Dans une ambiance de guerre et de tensions internationales, la 10e Conférence d’examen (RevCon) du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) entame ses dernières heures. La possibilité ce vendredi 26 août de l’adoption d’un document final, après un mois de négociations, semble très complexe ! Pourtant, cela représenterait un renforcement de la sécurité internationale.
Les États ont donc jusqu’à vendredi 26 août 18 h (de New York), pour adopter un document final, qui manifesterait le succès de cette conférence et redonnerait un peu de force à ce régime juridique. Cependant, comme les RevCon précédentes ont pu le souligner (notamment en 1995, en 2000 et en 2010), les mesures acceptées (obligations de désarmer, diminution de la centralité de la dissuasion, réduction du rôle des armes nucléaires dans les doctrines de sécurité…) ne furent jamais réalisées par les États dotés de l’arme nucléaire (États-Unis, Russie, Chine, France et Royaume-Uni). Par exemple, la France agit totalement à rebours en poursuivant la modernisation et le renouvellement complet de ses deux composantes nucléaires.
Actuellement, le draft disponible contient des éléments que l’on peut qualifier de positifs sur les conséquences humanitaires des armes nucléaires ; mais ICAN France regrette que :
- Les différents engagements proposés sur le désarmement ne sont assortis d’aucun calendrier précis ; contrairement au Plan d’action de Vienne, acté lors de la première réunion du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN) ;
- Il n’y a aucune condamnation claire de toute menace d’utilisation d’armes nucléaires, implicites ou explicites. Une absence en raison, d’une part, d’une Russie qui ne veut pas « s’autocritiquer » suite aux multiples menaces exercées par elle depuis son invasion de l’Ukraine (tant en 2014 qu’en 2022) et, d’autre part, le simple fait de développer une politique de dissuasion induit — pour toutes les puissances nucléaires — la mise en œuvre d’une menace d’emploi permanente ;
- S’il est indiqué que « la conférence reconnaît que le TIAN a été adopté le 7 juillet 2017 » et « reconnaît en outre son entrée en vigueur le 22 janvier 2021 » comme la tenue de sa première Réunion (Vienne, 22/24 juin 2022), le langage utilisé reste léger au vu de l’impact de ce nouveau traité dans le régime mondial de non-prolifération et sa complémentarité avec le TNP ;
- Le paragraphe sur la création d’une zone exempte d’armes nucléaires et d’autres armes de destruction massive au Moyen-Orient est extrêmement faible et ne laisse en rien présager une volonté d’agir dans ce sens par les États dotés d’armes nucléaires.
Les négociations vont encore se poursuivre ces deux derniers jours et donc tout est encore possible sur l’acceptation ou non d’un document final. Cependant, une réelle crainte fait à nouveau jour pour les États non dotés, comme pour ICAN France : que signifierait l’obtention d’un tel texte, si au cours des années qui suivent (comme ce fut le cas par le passé) les puissances nucléaires n’agissent pas en respectant leur engagement ? Cette réalité a déjà entamé la crédibilité du TNP, et il ne faudrait pas que cela se poursuive. Car si ce régime devait un jour faillir totalement, la faute n’en incomberait pas aux États non dotés d’armes nucléaires (qui soutiennent dans leur majorité le TIAN), mais bien aux États-Unis, à la Russie, à la Chine, à la France et au Royaume-Uni.