Armes nucléaires : vers des avancées parlementaires ?

Au terme de plusieurs mois de travail, deux députés, MM. Michel Fanget (Modem) et Jean-Paul Lecoq (communiste) viennent de rendre public leur rapport d’information : « L’arme nucléaire dans le monde, 50 ans après l’adoption du Traité sur la non-prolifération nucléaire ».

Ce rapport a été approuvé à l’unanimité le 11 juillet 2018 par la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale (regarder la vidéo du débat) et vient corroborer la volonté d’une majorité (67 %) de Français* qui souhaite que la France s’engage dans la ratification du Traité d’interdiction des armes nucléaires (TIAN). ICAN France — comme d’autres acteurs de la société civile  — figure parmi les personnes auditionnées.

Réalisée pour faire le point à l’aube du cinquantième anniversaire de l’adoption du Traité sur la non-prolifération nucléaire  (TNP) en prévision de la prochaine conférence d’examen de 2020, ce rapport est le premier document parlementaire à analyser la nouvelle donne créée par l’adoption du TIAN par l’ONU. Les auteurs soulignent que « l’avènement d’un monde sans armes nucléaires est en effet la seule issue viable pour l’humanité » tout en reconnaissant que « toutes les puissances nucléaires se livrent actuellement, à des degrés divers, à un effort de modernisation de leur force nucléaire ».

S’inquiétant que « si l’arme nucléaire est sécurisante, alors comment justifier que seuls certains États y aient accès ? », ils lancent un appel — que ICAN France soutient bien évidemment ! — pour « redonner sans tarder toute sa centralité au pilier du désarmement nucléaire ».

Pour cela, les deux rapporteurs formulent 11 recommandations. Trois d’entre elles retiennent tout particulièrement notre attention.

Recommandation n° 6 : « La France devrait avoir une position constructive et ambitieuse en faveur de la négociation d’un traité d’interdiction de la production de matières fissiles pour les armes qui prévoirait, en procédant par étapes, un arrêt de la production, un démantèlement des installations et une destruction progressive des stocks, le tout assorti d’un mécanisme de vérification fiable ».

  • Position ICAN France Cette demande de prise en compte des stocks (estimés à +/- 30 tonnes) — qui a toujours été refusée par la diplomatie française —, apporte une pleine crédibilité à ce projet de traité qui deviendra alors un véritable instrument en faveur du désarmement nucléaire.

Recommandation n° 9 : « La France devrait atténuer ses critiques à l’encontre du Traité d’interdiction des armes nucléaires (TIAN) et des pays qui ont contribué à son adoption, de façon à montrer que nous comprenons et prenons en compte les préoccupations de ces États et leur aspiration à une gouvernance mondiale plus équilibrée ».

  • Position ICAN France : Les attitudes et les mots (notamment de Jean-Yves Le Drian qualifiant les États favorables au TIAN « d’irresponsables ») furent incompris par de nombreuses diplomaties dans le monde. ICAN France a toujours souhaité — malgré la position de refus du traité par la France — que sa diplomatie engage un processus de dialogue constructif, notamment en devenant membre observateur du TIAN quand celui-ci entrera en vigueur ; ce qui serait une preuve de son engagement pour une plus grande sécurité collective et gouvernance mondiale.

Recommandation n° 10 : « La France devrait mettre en place, au sein du Parlement, une Délégation permanente à la dissuasion nucléaire, à la non-prolifération et au désarmement. Sur le modèle de la Délégation au renseignement, celle-ci comprendrait des députés et sénateurs issus des différentes commissions compétentes et aurait accès à certaines informations jugées sensibles, notamment sur le financement de la dissuasion nucléaire ».

  • Position ICAN France : Nous nous félicitons de ce projet de délégation dont nous appelons la création depuis de nombreuses années. Nous veillerons à sa bonne mise en place et au rôle constructif que celle-ci jouera pour enfin lever « cette confiscation démocratique » comme le faisait remarquer en 2013 l’ex-Premier ministre Michel Rocard et le député François de Rugy.

Ci-dessous, vous pouvez également lire la conclusion générale de ce rapport :

 

* Sondage La Croix/Mouvement de la Paix, juin 2018

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