Le 7 juillet 2017, 122 Etats ont adopté, à l’ONU, le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN). Le TIAN comble un vide juridique et renforce le Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) en interdisant les armes nucléaires de la même façon que la communauté internationale a banni les autres armes de destruction massive, à savoir les armes biologiques et chimiques.
LE TRAITÉ
Le TIAN interdit aux pays de développer, de tester, de produire, de fabriquer, de transférer, de posséder, de stocker, d’utiliser ou de menacer d’utiliser (soit la politique de dissuasion) des armes nucléaires ou de permettre le déploiement d’armes nucléaires sur des territoires. Il interdit également d’aider, d’encourager ou d’inciter quiconque à s’engager dans l’une de ces activités.
23 Etats ont ratifié ce traité. La Bolivie, l’Equateur, le Kazakhstan sont en passe de déposer leur instrument de ratification dans les prochaines semaines et 24 Etats (dont l’Irlande, Algérie, Philippines…) ont entamé leur procédure législative pour ratifier ce traité, ce qui permettra d’atteindre le nombre minimum requis de 50 pour son entrée en vigueur.
LA POSTURE DE LA FRANCE
Peur : Si nous sommes loin des propos non diplomatiques du ministre Le Drian à l’encontre des Etats qualifiés d’«irresponsables » qui ont voté le TIAN ; la diplomatie française reste extrêmement critique à l’égard de ce traité et pèse de tout son poids (pressions internationales) pour empêcher son entrée en vigueur.
Incohérence : La France se targue dans sa « Stratégie humanitaire (2018-2022) », de vouloir promouvoir le respect du droit international humanitaire (DIH) car pour le ministre des affaires étrangères « le respect du droit international humanitaire n’est pas une option : c’est une obligation ». En combattant le TIAN, la France s’oppose au DIH, car avec une politique de dissuasion nucléaire, les autorités politiques et militaires sont conscientes et ont accepté (pour rendre crédible cette politique) d’utiliser des armes nucléaires sur des populations civiles.
Multilatéralisme : Un mot uniquement présent dans les discours du Président puisque dans la réalité, la France, avec ses partenaires nucléaires du P5 (Etats-Unis, Russie, Chine, Royaume-Uni) forme « un cartel, un gang », comme l’a lourdement mentionné (9 mai), à la conférence du TNP, l’ambassadeur d’Afrique du Sud.
L’APPEL DES VILLES
Paris (le 17 mai 2019) est la toute première ville de France à afficher son soutien officiel au TIAN, en signant l’Appel des Villes lancé par notre campagne ICAN. Depuis les villes de Grigny, Bezons, Bagneux, Gonfreville l’Orcher, La Courneuve, Genevillier, Champigny-sur-Marne, Allones ont décidé de suivre ce mouvement car les Maires de ces communes sont « fermement convaincus que leurs habitants ont le droit de vivre dans un monde libre de cette menace nucléaire ». À ce jour plus d’une cinquantaine de villes d’Europe (Berlin, Oslo, Bern, Milan, Granollers), d’Amérique du Nord (Toronto, Baltimore, Los Angeles, Washington), du Pacifique (Sydney, Melbourne) ont déjà décidé d’adhérer à cet Appel.
Citations des porte-paroles de ICAN France
- Patrice Bouveret, directeur de l’Observatoire des armements : « À l’heure ou le monde connaît une nouvelle course aux arsenaux nucléaires, à travers les modernisations et le renouvellement des forces nucléaires, il est incroyable que la France utilise un argumentaire similaire à celui de la Corée du Nord pour justifier sa posture nucléaire. Pour la première fois depuis la fin de la guerre froide, le budget dissuasion dépasse la barre symbolique des 4 milliards d’euros et atteindra le montant annuel faramineux de 6,5 milliards d’ici moins de 4 ans. Il est temps que les parlementaires s’interrogent sur les bons outils de sécurité pour les générations actuelles et futures et donc sur la dépense de cet argent public ».
- Jean-Marie Collin, chercheur associé au GRIP : « La France doit être en cohérence avec sa politique du multilatéralisme et sa responsabilité de membre permanent du Conseil de sécurité. En s’opposant au TIAN, la France renforce l’instabilité mondiale et se comporte comme les Etats-Unis en s’isolant de la dynamique internationale de désarmement. Le Président doit prendre des initiatives en faisant de la France un membre observateur de la première conférence du TIAN et en ouvrant le débat en Europe et dans le monde sur le désarmement nucléaire. Les parlementaires ont aussi leur responsabilité, notamment en mettant en place la délégation permanente à la dissuasion nucléaire, à la non-prolifération, à la maîtrise de l’armement et au désarmement adoptée en juillet 2018 par la commission des Affaires étrangères. »