En 2010, j’ai vécu, jour après jour, la Révolution qui a secoué la Tunisie puis l’ensemble du monde arabe, et ce, depuis ses prémices. Comme tout jeune et adepte d’une vision internationaliste, j’ai rêvé de participer à l’écriture d’un avenir meilleur pour cette région, empreinte d’une paix mondiale et durable. Je fais aussi partie de cette génération « Y » qui vit avec les nouvelles technologies. Les NTIC ont permis un changement profond dans la politique internationale. Elles ont aussi permis de donner la parole aux peuples.
L’histoire d’Hiroshima et de Nagasaki est-elle en train de se répéter ?
Le progrès technologique s’est étendu, également, depuis 2010 dans l’armement et plus particulièrement l’armement nucléaire. Ce qui équivaut à l’émergence d’une nouvelle course à la modernisation des armes de destruction massive entre États. Le document « Nuclear Posture Review », publié par les Etats-Unis (février 2018), affirme que les menaces mondiales ont nettement augmenté depuis 2010 et qu’ils se trouvent maintenant dans un environnement de menaces nucléaires plus diverses et technologiquement plus avancées que jamais. L’environnement géopolitique dans la région Maghreb / Moyen-Orient, confirme cette dégradation. Le risque d’utilisation, intentionnelle ou non, des armes nucléaires entre des forces régionales et internationales augmente de plus en plus.
La compétition nucléaire dans cette zone du monde, entre les puissances (Russie, Chine, Israël) nucléaire et non-nucléaire (Iran, Syrie) s’accompagne d’une recrudescence des tensions, et sont focalisés sur le dossier nucléaire iranien. Depuis 2019, il en a résulté une importance accrue de confrontations diplomatiques voir militaire entre l’Iran et les Etats-Unis, fondée sur la peur dans les deux camps. Des tensions ont laissé entrevoir le début d’une nouvelle guerre dont nul ne peut exclure que cela ne débouche sur une frappe nucléaire. La région est plus que jamais déstabilisée par les conflits armés : de l’Irak à la Syrie en passant par la Libye et l’éternel conflit israélo-palestinien. Les conflits par procuration sont particulièrement prépondérants aujourd’hui. La réémergence de nouvelles formes de groupes terroristes menace et a même peut-être menacé le contrôle et la sécurité des armes nucléaires américaines basées sur la base turque d’Incirlik, situé à une centaine de kilomètres de la Syrie. On peut craindre que les armes nucléaires puissent devenir des cibles d’attaques terroristes. Si ce scénario venait à se réaliser, il serait synonyme de destruction totale de notre monde. Le même rapport « Nuclear Posture Review » rappelle que la lutte nucléaire américaine contre le terrorisme soit limitée, les adversaires doivent comprendre qu’une attaque terroriste nucléaire contre les USA ou leurs alliés serait considérée comme une circonstance suite à laquelle les États-Unis pourraient envisager la même forme de représailles. Ainsi, pour éviter que ce scénario ne se produise, il est absolument indispensable d’abolir les armes nucléaires.
À mes yeux, nous devrions agir pour imposer notre droit à une paix mondiale durable. Les peuples et notamment les populations de la région Maghreb Moyen-Orient doivent empêcher un nouvel Hiroshima et Nagasaki. Cela doit passer par les mobilisations massives devant les lieux des pouvoirs (comme ce fut le cas le 1er février 2019) Nous devons prendre l’initiative avec les moyens légitimes et plaider afin de faire entendre nos voix pour abolir les armes nucléaires. C’est en agissant consciemment ensemble, en éduquant les nouvelles générations à cette cause et en mettant en place des lieux de commémoration et de mémoires, aux quatre coins du monde, que nous empêcherons qu’une nouvelle guerre nucléaire n’éclate.
Que dirons-nous aux enfants de demain sur les conséquences des armes nucléaires ?
Notre mémoire collective continue de se remémorer les effets destructeurs des armes nucléaires qui ont été utilisées. Elle continue aussi de transmettre d’une génération à une autre les douleurs causées par la destruction : l’effet de souffle, la chaleur, l’impulsion électromagnétique et le rayonnement ionisant lors de la destruction des villes d’Hiroshima et de Nagasaki. Ces explosions nucléaires provoquent sur l’être humain des séquelles comme des lésions, la surdité et des brûlures à la rétine. A long terme, cela engendre de la radioactivité du fait des retombées des éléments contaminés, qui peuvent être transportés sur de très grandes distances. Si une guerre venait à éclater par l’utilisation de bombes nucléaires, (quelques centaines suffiraient) des impacts importants sur le climat se feraient sentir. Un scénario apocalyptique attendra alors l’humanité : tempêtes de poussière, incendies en masse, baisse conséquente des températures. Ce qui, à son tour, aura des conséquences écologiques durables : destruction des circuits végétaux, rupture de la chaîne alimentaire et un impact aussi sur la vie animale.
Nous ne pouvons plus attendre. Il faut agir avant qu’il ne soit trop tard ! C’est pourquoi je mène une campagne de sensibilisation sur l’impact des armes nucléaires au sein de la société tunisienne à travers des échanges grâce aux nouvelles technologies de l’information et de la communication.
A cet égard, j’ai initié le projet « Cercle de réflexion citoyen AGORA » en France, avec des amis (dont Sophie Angot). L’objectif étant de créer un espace d’échanges, par le biais de tables rondes, entre jeunes professionnels différentes origines afin de réfléchir et d’expliquer librement des problématiques sociétales actuelles, et notamment la question nucléaire et la guerre au Moyen-Orient et au Maghreb. Pour conclure, avec les mots de Stéphane Hessel dans son livre Indignez-vous : « Aux jeunes, je dis : regardez autour de vous, vous y trouverez les thèmes qui justifient votre indignation. Vous trouverez des situations concrètes qui vous amènent à donner cours à une action citoyenne forte. Cherchez et vous trouverez »
Nidhal Rojbi, rojbi.nidhal(@)hotmail.fr, étudiant en Master études politiques au Nouveau collège des études politiques, Paris Lumière. J’ai obtenu une licence en sciences humaines et sociales de l’INALCO. Je suis lauréat de l’institut de l’Engagement et fondateur du « Cercle de réflexion citoyen AGORA ». « J’ai rencontré ICAN-France lors de l’Université de l’Engagement à Autrans (été 2019). J’ai eu la chance d’assister à un atelier présidé par M. Jean Marie Collin intitulé « Comment plaider en faveur du désarmement nucléaire ?», qui m’a fait découvrir une nouvelle vision militante du sujet des armes de destruction massive. J’ai ainsi pris conscience de l’importance de plaider en faveur du désarmement nucléaire et je souhaite joindre ma voix à celles et ceux engagés dans la campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires. »