En 2009, l’ONU a décrété, par consensus, le 29 août « Journée internationale contre les essais nucléaires« , rappelant que « l’arrêt des essais nucléaires est l’un des principaux moyens d’atteindre l’objectif d’un monde sans armes nucléaires » (résolution 64/35). Cette journée existe pour que nous ne ménagions aucun effort afin d’éviter toute nouvelle utilisation de ces armes de destruction massive, devenues hors-la-loi depuis le 7 juillet 2017, suite à l’adoption par l’ONU du traité d’interdiction des armes nucléaires avec 122 voix pour, 1 contre et 1 abstention.
Par Patrice Bouveret, membre du Comité d’Animation d’ICAN France et Directeur de l’Observatoire des Armements
La journée internationale contre les essais nucléaires s’inscrit en soutien du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE), adopté en 1996, devenu une norme universellement acceptée, même s’il n’est toujours pas entré en vigueur du fait de l’absence de ratification par certains États déterminants dans ce domaine (la Chine, la Corée du Nord, l’Égypte, les États-Unis, l’Inde, l’Iran, Israël, et le Pakistan). Elle vise à « mobiliser les États membres de l’ONU, les organisations intergouvernementales et non gouvernementales, les milieux universitaires, les réseaux de jeunes et les médias vers l’édification d’un monde plus sûr » et de manifester notre solidarité avec toutes les victimes des plus de 2 000 essais nucléaires réalisés dans le monde, dont 210 par la France dans le Sahara et en Polynésie.
Suite à la réprobation internationale unanime contre la reprise des essais décidée par Jacques Chirac en 1995, alors nouvellement élu président de la République, la France a mis un terme définitif en 1996 à la réalisation d’explosions nucléaires grandeur nature et elle a ratifié en 1998 le TICE tout en développant un programme dit de simulation pour poursuivre la modernisation de son arsenal.
Blocage du processus d’indemnisation des victimes en France
Suite à l’action des associations de victimes des essais nucléaires et de leur soutien, les parlementaires ont modifié en février 2017 la loi Morin d’indemnisation en supprimant la notion de « risques négligeables » qui entraînait le rejet de plus de 90 % des dossiers déposés. Mais, le 18 juillet, quasiment tous les membres du Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen) ont démissionné suite à la modification de la loi qui les prive désormais de toute expertise scientifique sur les dossiers d’indemnisation. Résultat : alors qu’une avancée avait été obtenue, le système d’indemnisation se retrouve à nouveau bloqué, aucuns nouveaux dossiers ne pouvant être examinés par le Civen. Plus de 20 ans après la fin des essais, les victimes de ces essais se trouvent toujours privées de reconnaissance pour les conséquences subies du fait des essais nucléaires.
La France non seulement s’oppose à la démocratie internationale en manifestant son refus de signer le traité d’interdiction des armes nucléaires, mais elle refuse aussi vérité et justice pour les populations et les personnels affectés par les conséquences de sa politique nucléaire.
Il serait temps pour nos dirigeants de faire correspondre les valeurs universelles qu’ils affirment en signant et en ratifiant ce traité comme la première étape vers l’élimination des armes nucléaires et en indemnisant les victimes des essais nucléaires français.