La semaine dernière, Asia Balluffier, étudiante au CFJ Paris (Centre de formation des journalistes), contactait la coordinatrice d’ICAN Youth, Silene Theobald, pour lui poser trois questions sur la campagne. Au moment où l’organisation internationale ICAN (Campagne internationale pour abolir les armes nucléaires) figure parmi les candidats au prix Nobel de la paix 2015, la coordinatrice de sa branche jeunesse pour la France explique pourquoi l’interdiction de l’arme nucléaire est pour bientôt.
ASIA BALLUFFIER. Pourquoi la question des armes nucléaires est-elle un enjeu si peu populaire en France ?
SILENE THEOBALD. Je pense qu’il y a une réelle volonté de l’État de ne pas en faire l’objet d’un débat dans l’espace public. Sans verser dans la théorie du complot, rappelons que la France fait partie des neuf pays qui détiennent l’arme nucléaire. Pour les jeunes, il faut savoir qu’à aucun moment dans notre système scolaire on n’évoque ce débat. J’ai terminé mes études il y a un an et jamais on ne m’en a parlé. À peine survole-t-on les bombardements d’Hiroshima et Nagasaki.
AB. Chez les jeunes, ce déficit est encore plus grand ?
ST. Oui, nous avons constaté que la société civile mobilisée sur cette question était assez âgée. Elle est surtout composée des générations post soixante-huitardes à qui la Guerre froide a fait peur. C’est problématique parce que l’enjeu aujourd’hui nécessite une nouvelle approche. C’est là que la génération des 18-30 ans a un rôle à jouer. C’est malheureusement peu le cas en France aujourd’hui et c’est pourquoi nous avons lancé le projet ICAN Youth, soutenu par la Commission Européenne. L’objectif est justement de produire l’information qui manque pour la diffuser et la rendre accessible à tous. Cela passe par des conférences et des événements dans les universités et les lycées, une présence sur les réseaux sociaux et le dialogue avec des interlocuteurs institutionnels.
AB. ICAN est citée parmi les prétendants au prix Nobel de la Paix 2015, l’anniversaire des 70 ans d’Hiroshima et Nagasaki a fait beaucoup parlé : se dirige-t-on vers une interdiction des armes nucléaires dans les décennies à venir ?
ST. Notre génération verra l’interdiction des armes nucléaires, j’en suis persuadée ! Nous vivons à une époque où la société civile a beaucoup de pouvoir et d’influence sur ces questions. C’est elle qui a permis que les mines antipersonnel et les armes à sous-munition soient bannies au niveau international. Il faut nous en donner les moyens, avec une mobilisation organisée et efficace, tout en conservant une démarche humanitaire. Mais notre génération finira par obtenir un traité international d’interdiction, c’est en tout cas la raison pour laquelle nous nous engageons.