Pour la première fois, un rapport de notre campagne, montre le lien entre l’entrée en vigueur du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires et la diminution du nombre d’investisseurs financiers dans le secteur du nucléaire militaire. Pour la France, toutes les banques restent, par contre actuellement, en dehors du droit international et continuent de réaliser des investissements radioactifs pour plus de 44 milliards de dollars !
ICAN et l’ONG Pax viennent de publier le rapport, qui porte sur la période 2019-2021, « De dangereux profiteurs : les entreprises qui construisent des arsenaux nucléaires et leurs bailleurs de fonds » qui expose les banques, les fonds de pension, les gestionnaires d’actifs et les compagnies d’assurance qui investissent dans la production de systèmes d’armes nucléaires. Ce rapport analyse les entreprises impliquées dans la production, la fabrication ou le développement d’armes nucléaires pour six États : les États-Unis, la Russie, le Royaume-Uni, la France, la Chine et l’Inde.
L’impact du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires :
En vigueur depuis le 22 janvier 2021, ce traité interdit les actions de financement et d’investissement dans toutes les entreprises qui produisent des systèmes conçus pour mettre en œuvre les armes nucléaires.
Le TIAN est en train de transformer le paysage financier, et il est l’origine des changements importants dans la manière dont une partie du monde financier traite désormais les armes nucléaires. Cela se traduit pour la première fois par un mouvement de retrait des institutions financières de ce secteur: 127 institutions financières ont cessé d’investir dans des entreprises produisant des systèmes d’armes nucléaires, pour une valeur de 31 milliards de dollars ;
- Une majorité des 127 institutions ont invoqué comme raison l’entrée en vigueur du TIAN et le risque d’une perception négative par le public ;
- Un grand nombre de ces institutions sont installées dans des États membres du TIAN (comme Investec en Afrique du Sud ou pour l’Irlande AIB et la Bank of Ireland) ;
- Nous pouvons aussi observer des institutions installées dans des États possédants des armes nucléaires (États-Unis : Longview Asset Management) ou soutenant la politique de dissuasion (au Japon avec la Nomura, et en Norvège avec le fonds de pension souverain KLP).
De plus, si 685 milliards de dollars ont été mis à la disposition des 25 entreprises productrices d’armes nucléaires au cours de cette période, cela marque en fait une baisse de 63 Mds de dollars en comparaison au rapport 2019 « Shorting our security » ! Le TIAN est donc bien en train de transformer le paysage financier.
Les banques françaises poursuivent leur course économique à la bombe :
Jean-Marie Collin, co-porte-parole de ICAN France regrette que « les banques françaises abordent un langage typique du greenwashing. D’un côté, elles prétendent appliquer une politique d’exclusion de financement de ce type d’arme, mais en réalité, comme le montre ce rapport, elles investissent massivement dans ce secteur du nucléaire militaire. De plus, elles ont décidé d’interpréter les règles de droit international existantes (en l’occurrence le Traité de non-prolifération nucléaire) et d’exclure la nouvelle norme juridique que représente le TIAN. Elles sont donc dans une démarche qui est de s’opposer au droit international.»
Onze institutions françaises, pour la période du 1er janvier 2019 au 1er octobre 2020, ont investi plus de 44 milliards de dollars selon ce nouveau rapport. Il est à noter que la BNP continue d’investir (411 millions de dollars) dans une entreprise indienne (Larsen & Toubro Limited)qui participe à la création des forces nucléaires indiennes.
Patrice Bouveret, Directeur de l’Observatoire des Armements, appelle « ces banques de façon urgente à arrêter cette finance radioactive et leur client à reprendre le contrôle de leur épargne » en contactant leur chargé de clientèle pour demander la fin de ces investissements conformément au TIAN. »
ICAN France demande à ces banques de façon urgente :
- d’élargir leur définition des armes nucléaires en incluant clairement les vecteurs (comme les missiles balistiques, les missiles de croisières) et équipements associés (comme les plateformes de lancement dédiées tels les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins ou les avions de chasse équipés d’une capacité nucléaire, …) conçus pour mettre en œuvre les armes nucléaires ou pour assurer leur pérennité (tels les systèmes de simulation) ;
- d’inscrire et d’adopter le TIAN dans leur politique sectorielle armement et défense ;
- d’inscrire sur une liste noire toutes les entreprises impliquées dans la production ou le développement d’armes nucléaires et équipements associés ;
- d’appliquer une politique d’exclusion concernant tous les produits financiers, y compris à toutes les catégories de gestion d’actifs concernant des entreprises produisant des systèmes relatifs aux armes nucléaires ;
- de réactualiser leur vision du TNP pour assurer une cohérence avec les obligations et les interdictions de ce traité et de fait supprimer l’exception de financement actuellement mis en œuvre pour les puissances nucléaires et les membres de l’Alliance Atlantique.