Communiqué de presse
Nos organisations, partenaires européens de la Campagne internationale pour abolir les armes nucléaires (ICAN), sont alarmées par la rhétorique dangereuse et proliférante de certains de nos chefs d’État et de gouvernement en faveur d’un parapluie nucléaire franco-britannique. Cette dynamique met à mal des décennies d’engagements européens en faveur du désarmement nucléaire, de la non-prolifération et du droit international, et révèle une profonde hypocrisie. Un jour, ces États prétendent défendre l’architecture de sécurité internationale, à savoir le traité de non-prolifération nucléaire (TNP) ; le lendemain, ils débattent ouvertement de l’armement nucléaire. Leurs efforts pour condamner les menaces nucléaires des autres sonnent plus creux de jour en jour. Il va sans dire que si les projets se concrétisent, ils réduiront la sécurité des Européens et, en fait, de tous les États.
Nous assistons à une recrudescence de la rhétorique autour de la présentation des armes nucléaires comme stratégie de sécurité dans nos pays européens. Cependant, nous partageons la conviction que la dissuasion nucléaire ne pourra jamais constituer une stratégie de sécurité responsable ou durable. La dissuasion nucléaire n’est pas une solution, elle fait partie du problème. Elle signifie intrinsèquement que l’on est toujours prêt, capable et menace de commettre des massacres contre des populations civiles. Il est condamnable qu’un État, mais surtout ceux qui prétendent défendre et promouvoir la démocratie, les droits de l’homme et le droit humanitaire international, parle de risquer la vie et les moyens de subsistance des civils.
L’Europe ouvre la porte à la prolifération
Les gouvernements européens se sont longtemps positionnés en défenseurs du droit international, y compris du droit humanitaire international, renforçant ainsi le Traité de non-prolifération (TNP). Ils ont fait valoir que la réduction des stocks d’armes nucléaires et la promotion de mesures de contrôle des armements étaient la preuve de leur engagement envers le TNP. Or, ce 5 mars 2025, jour du 55e anniversaire du TNP, le président Macron a annoncé qu’il ouvrait la porte à un parapluie nucléaire européen, rompant ainsi l’esprit de ce même traité.
Normaliser les armes nucléaires et affaiblir l’architecture de sécurité internationale est un pas dans la mauvaise direction, surtout aujourd’hui où le risque de guerre nucléaire est plus élevé que jamais. Tous les États devraient renforcer les normes internationales contre les armes nucléaires, et non les affaiblir. Si les États européens affaiblissent leur position sur les armes nucléaires, quel message cela envoie-t-il au reste du monde ? Et comment peuvent-ils s’opposer de manière crédible à la posture nucléaire de la Russie ou d’autres pays tout en envisageant de prendre eux-mêmes des mesures similaires ?
Les États européens devraient prendre des mesures réfléchies au lieu de paniquer
En cette année de la 80e commémoration des tragédies d’Hiroshima et de Nagasaki, nous assistons à un débat qui se déroule beaucoup trop rapidement, sans tenir compte des voix opposées et de la réaction en chaîne des décisions : contre-réactions d’autres États, effondrement de notre régime nucléaire, prolifération et fin du tabou nucléaire qui existe depuis 1945. C’est précisément en raison de la situation difficile et des tensions élevées que tous les États doivent prendre des mesures réfléchies au lieu de paniquer.
Ces mesures nécessitent un leadership fort, du courage et de la cohérence. 800 villes européennes ainsi que les États européens de Malte, d’Autriche, d’Irlande, de Saint-Marin, du Liechtenstein et le Saint-Siège ont déjà adopté une position de principe en adhérant au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN). Entré en vigueur en 2021, ce traité est actuellement soutenu par 94 États et interdit tout recours aux armes nucléaires. Cela inclut la menace implicite et explicite d’utilisation d’armes nucléaires qui a un impact direct sur notre sécurité collective.
Nous saluons donc le travail réalisé par les États parties à la troisième réunion des États parties aux Nations unies du 3 au 7 mars 2025. Pour la première fois, les États ont discuté des préoccupations légitimes en matière de sécurité qui découlent de l’existence d’armes nucléaires, remettant en cause le mythe de la sécurité nucléaire.
En tant que société civile européenne, nous nous félicitons de ces discussions et continuerons à demander des comptes à nos gouvernements, à faire pression pour que le droit international soit respecté et à plaider en faveur du respect des droits de l’homme et de la création d’un monde sûr et juste pour tous les peuples. Notre mandat collectif est de pousser tous les États européens à s’engager et à rejoindre le TIAN, plutôt que de se détourner de leur responsabilité.
Organisations signataires
- Acronym Institute for Disarmament Diplomacy (Royaume-Uni)
- Alianza por el Desarme Nuclear (Espagne)
- Beati i costruttori di pace (Italie)
- Forbyd Atomvåben – ICAN au Danemark
- Friedenswerkstatt Mutlangen (Allemagne)
- ICAN Autriche – Kampagne zur Abschaffung von Nuklearwaffen
- ICAN France
- ICAN Finlande
- ICAN Allemagne
- ICAN Norvège
- IPPNW Finlande
- IPPNW Allemagne
- IPPNW Grèce
- IPPNW Norvège
- ICBUW (Allemagne)
- Medact U.K (Royaume-Uni)
- Medact Ecosse
- Amis de la Nature Grèce
- Nei Til Atomvåpen (Norvège)
- Norwegian People’s Aid (Norvège)
- NVMP Pays-Bas
- Ohne Rüstung Leben (Allemagne)
- Pax Christi Vlaanderen (Belgique)
- PAX for Peace (Pays-Bas)
- Peace Union of Finland (Finlande)
- Physicians for Social Responsibility (Finlande)
- Rete italiana Pace e Disarmo (Italie)
- Secure Scotland
- Swedish Physicians against Nuclear Weapons Swedish Peace and Arbitration Society
- Technology for Life Finland (Finlande)
- Trident Ploughshares (Royaume-Uni)
- UK/Ireland Nuclear Free Local Authorities
- Vrede vzw (Belgique)
- World Without Wars and Violence (Grèce)
Communiqué de presse, 7 mars, version anglaise