Selon le SIPRI, la diminution globale du nombre d’ogive nucléaire à travers le monde cache une modernisation et un renouvellement massif des forces nucléaires de la part des neuf États nucléaires. La France, troisième force nucléaire au monde, participe de manière aigue à ce processus au point d’avoir augmenté de 60 % ce budget nucléaire avec sa loi de programmation militaire 2019-2025.
Selon le SIPRI (Institut international de recherche sur la paix de Stockholm) le total des ogives nucléaires possédés par neuf États (États-Unis, Russie, France, Chine, Royaume-Uni, Pakistan, Inde, Israël, Corée du Nord) est de 13 865, soit 600 armes en moins par rapport à 2018. Cette baisse résulte de la diminution des arsenaux américains et russes du fait de leur accord bilatéral (traité New Start de 2010 qui prendra fin en 2021). Nous pouvons aussi remarquer une diminution d’une quinzaine d’ogives de l’arsenal britannique (faisant suite à une précédente diminution de 10 ogives en 2015). L’arsenal de la France reste, lui, toujours constitué — depuis 2011 — de 300 ogives.
- ICAN France pose la question : Pourquoi la France ne réduit-elle pas son arsenal comme les Britanniques ?
Sur les 13 865 ogives nucléaires, 3 750 sont déployées et près de 2 000 sont maintenues en état d’alerte opérationnelle élevée. À ce titre ICAN France constate que, selon le SIPRI, la France est dans une posture unique, car c’est 93,33 % de son arsenal (contre 28,29 % pour les USA et 24,61 % pour la Russie) qui est maintenue en état d’alerte opérationnelle élevée. Pourquoi ?
Toujours selon ce rapport la Chine, l’Inde, le Pakistan, Israël et la Corée du Nord augmentent la taille de leurs arsenaux nucléaires ou leur stock de matières fissiles pour s’assurer un arsenal plus important dans le futur.
Face au regain de tensions et aux risques que représentent les armes nucléaires, ICAN France invite les neuf puissances nucléaires à rejoindre le processus du Traité d’interdiction des armes nucléaires (TIAN) adopté le 7 juillet 2017 par 122 États à l’ONU, seul à même de renforcer la paix et la sécurité de la planète et de ces habitants…
En réaction à cette publication du SIPRI :
Jean-Marie Collin, expert et co-porte-parole de ICAN France :
- « Cette réalité décrite par le SIPRI renvoie à l’absence totale de respect par la France de ces obligations de désarmement acceptée à travers le Traité de non-prolifération nucléaire. Le fait que 93,33 % de l’arsenal français soit en état d’alerte, pose la question de la réalité d’une force de dissuasion nucléaire qui ne s’entend, selon le langage diplomatique, “que dans le cadre d’une stratégie défensive” ! Comme toujours nous sommes devant undouble langage. »
- « Il est urgent que le Parlement et en particulier la présidente de la commission des Affaires étrangères, Mme de Sarnez, réalise la mise en place de la délégation permanente à la dissuasion nucléaire, à la non-prolifération, à la maîtrise de l’armement et au désarmement adoptée en juillet 2018 par sa commission. Ce format pourrait alors enfin amener la réflexion qui manque cruellement au sein de cette instance dont le rôle est de contrôler l’exécutif »
Patrice Bouveret, directeur de l’Observatoire des armements et co-porte-parole de ICAN France
- « Le constat dressé par le SIPRI reflète ladécision du président Macron de dépenser 37 milliards d’euros sur la modernisation et le renouvellement de tous les systèmes d’armes nucléaires français. C’est donc 13,7 milliards de plus par rapport au président Hollande ou encore 16,75 milliards de plus par rapport au président Sarkozy ! Cette volonté de poursuivre une politique du siècle passé pose la question de savoir si l’actuel gouvernement veut vraiment assurer la sécurité de la vie des Français ou subvenir uniquement aux carnets de commandes des industriels de la défense ? »
- « Croire que jamais un de ces États n’utilisera son arsenal, par erreur avec le risque des cybermenaces, où volontairement est une pensée insensée. Peu importe que cette détonation se réalise en Asie ou en Russie, nous en subirons les conséquences humanitaires, climatiques, sécuritaires et économiques. L’absence volontaire d’action concrètes de la France en faveur du désarment nucléaire est dangereuse. Il est urgent que la France s’ancre dans la nouvelle réalité du monde, celle qui regroupe la majorité des États de la communauté internationale qui soutient le Traité d’interdiction des armes nucléaires. »