Non au détournement de l’épargne au profit de l’industrie d’armement

TRIBUNE : L’industrie d’armement pour résoudre la crise du logement, de l’exclusion et du dérèglement climatique ? C’est la solution que proposent des parlementaires (Les Républicains, Renaissance, Horizon, …) avec l’appui du gouvernement en voulant détourner les fonds de « l’épargne populaire », à leur profit.

 

Photo d’illustration Livret A. Gile/ANDBZ/ABACAPRESS.COM

L’épargne réglementée issue du Livret A et du Livret de développement durable et solidaire (LDDS) a vocation à répondre aux besoins vitaux de la population à travers, notamment, le financement du logement social et de la transition écologique.

Il n’y a aucun doute sur la crise du logement que notre pays traverse. Plus de 4 millions de personnes sont confrontées chaque jour à cette réalité, selon la Fondation Abbé Pierre, sans compter les 330 000 sans domicile fixe. Il y a urgence, en métropole comme en outremer, à engager et financer un véritable plan en matière de construction et de rénovation des logements sociaux pour répondre aux besoins des différentes populations. Une activité qui de plus générerait une attractivité économique forte, synonyme d’emploi.

À cette crise, s’ajoute le dérèglement climatique que plus personne ne peut nier. Nous avons besoin maintenant du maximum de fonds pour engager la transition écologique afin d’en diminuer l’impact, dont les effets se multiplient sur notre sol entre pluie diluvienne, sécheresse et incendie. Alors que se déroule la COP 28, il nous apparaît indécent d’entendre le président tenir un tel double discours entre un appel à la protection de la planète à l’international et une volonté au niveau national de diminuer les moyens financiers nécessaires pour cette action.

Le procédé utilisé par certains parlementaires (Renaissance, Horizon, Les Républicains) est loin d’être honorable. Après s’être vu fermer la porte au nez en juillet dernier, il tente de passer par la fenêtre. En effet, le Conseil constitutionnel, le 28 juillet, a censuré l’article de la Loi de programmation militaire 2024-2030 qui attribuait une part de l’épargne au profit de l’industrie de l’armement. La raison invoquée du rejet est qu’il s’agissait d’un « cavalier législatif » ; c’est-à-dire une disposition introduite dans une loi, mais dépourvu de lien suffisant. Mais peu importe pour ces parlementaires. Car dans le projet de Loi de finances 2024, un amendement similaire a été réintroduit et adopté par l’Assemblée nationale via le 49.3, donc sans débat. Le Sénat peut encore le refuser…

L’industrie d’armement est une activité économique particulière dont la vie ne tient très souvent qu’à la commande de l’État. De son côté, le comportement des banques a changé : d’une part, pour se conformer au droit international qui interdit certaines catégories d’armes, comme les armes nucléaires, les mines antipersonnel où les bombes à sous-munitions et qui dispose de règles pour les ventes d’armes conventionnelles ; d’autre part, pour respecter les normes éthiques qu’elles ont volontairement acceptées (Global Compact de l’ONU, Principes pour un secteur bancaire responsable, Principes Équateur) ; et, enfin, pour être en accord avec les besoins exprimés par leur client qui exigent plus d’investissement socialement responsable.

Cette idée de détourner l’épargne au service du bien commun au profit des industries de défense est une erreur, et il faut l’admettre. Nul doute que le ressenti négatif des Françaises et Français à l’égard du monde politique va s’accroître avec une telle démarche. Si l’industrie de défense bénéficie de cette épargne populaire, alors cela va ouvrir la boîte de pandore vers une limitation des moyens financiers vitaux pour la population. L’idée est si mauvaise que même le ministre Bruno Le Maire s’est montré en désaccord.

Nous demandons le retrait de cet amendement néfaste et souhaitons que l’utilisation des fonds des Livrets A et du LDDS soit transparente et fasse l’objet d’un traçage précis et incontestable, afin de s’assurer qu’elle réponde bien aux besoins sociaux et écologiques, conformément à sa vocation première.

La tribune est à retrouver sur l’Humanité, publié le 12 décembre 2023.

Signataires

  • Abolition des armes nucléaires-Maison de vigilance
  • Action des Citoyens pour le Désarmement Nucléaire (ACDN)
  • Alternative Mutualiste
  • ATTAC France
  • CGT Banque de France
  • CGT Caisse d’épargne Île-de-France
  • CNAFAL
  • Collectif de Défense et de Développement des Services Publics du Douaisis
  • Comité de la Creuse du Mouvement de la Paix
  • Comité de Vigilance Service Public du 70
  • Confédération Nationale du Logement (CNL)
  • Convergence nationale de défense et de développement des services publics
  • Convergence nationale Rail
  • Droit à l’énergie SOS Futur
  • Ensemble ! (Mouvement pour une alternative de gauche écologique et solidaire)
  • Fondation Copernic
  • FSU
  • GDS (Gauche Démocratique et Sociale)
  • ICAN France (Campagne internationale pour abolir les armes nucléaires)
  • INDECOSA CGT national
  • INDECOSA-CGT (Aveyron, Deux-Sèvres, Hautes-Pyrénées, Ille-et-Vilaine, Indre-et-Loire, Loire, Val-de-Marne, Var, Vaucluse)
  • MAN (Mouvement pour une Alternative Non-violente)
  • Mouvement international de la Réconciliation (MIR-France)
  • Observatoire des armements
  • Réseau « Sortir du nucléaire »
  • Résistance sociale
  • SNUP HABITAT
  • Stop Fuelling War (Cessez d’alimenter la Guerre)
  • Stop Précarité
  • SUD PTT
  • Union Des Familles Laïques (UFAL)
  • Union Pacifiste de France
  • Union des syndicats CGT du groupe Caisse des dépôts (USCD CGT)
  • Université européenne de la Paix

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