Du 28 avril au 9 mai 2025 s’est déroulé à l’ONU la troisième session du comité préparatoire de la onzième conférence d’examen du Traité de non-prolifération nucléaire. Elle s’est conclue… sans conclusion. Les États ont été incapables d’adopter des recommandations. Ce n’est pas uniquement l’absence de consensus sur un document qui pose problème, mais bien l’incapacité totale des puissances nucléaires et de leurs alliés à répondre aux risques urgents auxquels fait face le monde. Avec comme risque, celui de condamner l’existence même du TNP.
Les États dit dotés d’armes nucléaires (États-Unis, Russie, Royaume-Uni, France, Chine) étaient censés répondre aux principales préoccupations concernant les armes nucléaires pendant cette réunion. Or le fait que certains (France, Royaume-Uni) souhaitent étendre leur « parapluie nucléaire » à des territoires supplémentaires, que d’autres (États-Unis, Russie) maintiennent le stationnement d’armes nucléaires dans des États non-nucléaires, et enfin que tous poursuivent le renouvellement de leurs arsenaux, signifient que ces États sont en train de condamner le TNP. Quelles que soient les justifications qu’ils avancent à propos des « environnements de sécurité internationaux complexes » ou des « instabilités géostratégiques », ils refusent d’appliquer le droit international qu’ils ont ratifié (la France en 1992) et qu’ils continuent de prétendre réaliser.
L’avenir de la sécurité internationale et du régime de contrôle de la prolifération nucléaire se jouera donc, du 27 avril au 22 mai 2026, date de la 11e Conférence d’examen du TNP qui sera sous la présidence du Viêt Nam.
À souligner une formulation étrange de la diplomatie française, qui illustre cette vision déformée du monde. L’ambassadrice Camille Petit a affirmé que les trois piliers du TNP (à savoir le désarmement nucléaire, la non-prolifération et l’usage pacifique de l’énergie nucléaire) « sont la pierre angulaire de la solidarité nucléaire internationale » !
- Que signifie exactement « solidarité nucléaire » ? Pour l’État français, ou pour tout État doté de l’arme nucléaire ? Est-ce le droit de partager leurs armes et leur doctrine les uns avec les autres et de menacer de les utiliser pour le compte des autres ?
- C’est conclure des accords de coopération nucléaire « civil » et refuser de prendre en charge les conséquences de ses explosions nucléaires comme avec l’Algérie ?
- Si la France y croyait vraiment, elle respecterait ses engagements au titre du premier pilier et engagerait le processus d’élimination de ses armes nucléaires !
Or, cette « solidarité » ne s’étend pas aux 98 États membres ou signataires du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN). Ces États sont rejetés et dénoncés par la France notamment, pour avoir eu l’audace de renforcer leur engagement à ne jamais acquérir d’armes nucléaires ou à ne jamais soutenir d’activités nucléaires, et pour tenter de remédier aux dommages nucléaires passés et de prévenir les dommages futurs. Ironiquement, le TIAN est un meilleur modèle de solidarité que le TNP.
Si la France ne veut pas être accusée de deux poids deux mesures en matière de « solidarité nucléaire internationale », elle devrait s’engager à participer comme État observateur lors de la première conférence d’examen du TIAN (en novembre 2026).
Communiqué de presse, 12 mai 2025