L’interdiction des armes nucléaires au cœur des discussions de l’ONU

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En février s’est ouvert à l’ONU la première session du groupe de travail chargé de faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire. 90 gouvernements et plusieurs organisations de la société civile ont participé à cette première session sur les nouvelles mesures juridiques, dispositions et normes possibles pour parvenir à un monde sans arme nucléaire durable.

 

Le nouveau groupe de travail de l’ONU sur le désarmement nucléaire, aussi connu sous le nom de Groupe de travail à composition non limitée chargé de faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire (ou Open-Ended Working Group – OEWG), a achevé la première de ses trois sessions en février. Le mandat de ce forum invite les participants à proposer de nouvelles mesures juridiques, dispositions et normes afin de parvenir à un monde sans arme nucléaire durable. Les 90 gouvernements et les organisations de la société civile présentes ont pu entendre l’avis de plusieurs groupes d’experts et se sont engagés dans un débat animé concernant l’élan généré par l’initiative humanitaire, la nécessité et la viabilité de nouveaux outils pour remplir le « vide juridique » et les risques inhérents à la possession d’armes nucléaires.

Le groupe de travail s’est ouvert le lundi 22 février avec le discours de l’ancien Secrétaire général, Kofi Annan, dénonçant l’absence de progrès au sein des forums déjà existants. Il a également salué la remise en question, par les États non dotés d’armes nucléaires, du fait que les « structures existantes » soient suffisantes pour faire avancer le désarmement nucléaire. « Le [groupe de travail] doit galvaniser l’opinion publique internationale et, je l’espère sincèrement, sortir de la léthargie dans lequel était plongé le débat sur le désarmement nucléaire au cours des dernières décennies » a déclaré Annan.

Malgré l’absence de détenteurs d’armes nucléaires, la légitimité et la crédibilité du forum n’ont jamais été remises en cause. Lorsque s’est ouvert le débat, il est devenu clair que des propositions en faveur d’un nouvel instrument juridique interdisant les armes nucléaires, même sans la participation initiale d’États qui en possèdent, seraient à l’ordre du jour. Le groupe de travail se réunira en mai prochain pour sa deuxième session (la plus longue des trois), au cours de laquelle seront étudiées des propositions et des discussions qui se sont démarquées au cours de la semaine dernière, au même titre que des documents de travail soumis par des gouvernements et des organisations de la société civile.

Dans une déclaration faite au nom des 440 organisations partenaires de la campagne, réparties dans 98 pays, la directrice exécutive de ICAN, Beatrice Fihn, a mis en exergue les nombreux vides juridiques qui règnent autour des armes nucléaires et a vivement encouragé les gouvernements à prendre les mesures nécessaires afin de faciliter la mise en place d’un nouvel instrument juridiquement contraignant. D’après ICAN, un nouvel instrument juridique interdisant le développement, la production, les essais, les transferts, les acquisitions, le transit, le stockage, le déploiement et l’utilisation d’armes nucléaires, au même titre que l’assistance, le financement, l’encouragement ou l’incitation à ces activités, devient indispensable pour combler tous ces vides juridiques. Fihn a également souligné l’obligation pour tous les États de travailler en ce sens : « Les États non dotés d’armes nucléaires ne sont pas simplement invités à œuvrer pour le désarmement ; ils en ont l’obligation, indépendamment des échecs constants des États qui possèdent des armes nucléaires à agir. »

De nombreux États ont approuvé la proposition d’un tel « traité d’interdiction » et ont souligné l’importance de poursuivre les efforts pour combler les vides juridiques sans la participation d’État qui possèdent l’arme nucléaire. Ces derniers ont, au cours des deux dernières décennies, tout fait pour compromettre un potentiel désarmement nucléaire, même dans le cadre du Traité sur la Non-Prolifération des armes nucléaire (TNP) et de la Conférence du désarmement, à bout de souffle.

Parmi les plus fervents partisans d’une interdiction, le Brésil et la Malaisie ont fait remarquer qu’un traité pourrait être négocié dès maintenant et ce dans le cadre d’un projet plus large qui inclurait la vérification de la destruction de stocks dans un second temps. Le Brésil a également mis en lumière le fait qu’un traité d’interdiction aurait le mérite d’être « ouvert à tous, sans que quiconque ne puisse s’y opposer ». Il a également proposé que le groupe de travail de l’ONU prévoie des éléments à inclure dans un tel traité. Dans le camp opposé, certains États ont déclaré être en faveur de la poursuite des mesures de transparence et de confiance. Ils militent également pour des composantes plus modestes, qui consistent majoritairement en des propositions déjà existantes, restées au stade embryonnaire dans des forums bloqués ou qui dépendent des États détenteurs de l’arme nucléaire pour fonctionner. Ils ont mis en garde contre les propositions qui, à terme, pourraient isoler les États possesseurs d’armes nucléaires et qui selon eux, pourraient déstabiliser le Traité sur la Non-Prolifération. Ces avis venaient essentiellement des États membres d’alliances militaires avec des États possédant l’arme nucléaire.

Le Groupe de travail à composition non-limitée se réunira à nouveau du 2 au 15 mai afin d’approfondir les différentes mesures juridiques. L’agenda de la prochaine session a été annoncé par le président du groupe, l’Ambassadeur thaïlandais Thani Thongphakdi. ICAN compte sur cette session pour mettre en lumière le soutien de la grande majorité des États en faveur d’un traité d’interdiction des armes nucléaires.

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